webfuuta-biblio0


Tierno Monenembo
Le roi de Kahel

Paris, Editions du Seuil. 2008. 261 pages


arrow-previous arrow-up arrow-next


Chapitre 24

C'était donc si simple !
Cinq minutes de guerre et voilà le Fouta écroulé ! Sur le chemin de Kahel, Olivier de Sanderval regarda tristement autour de lui. Il avait l'impression que la même cruelle amertume qui alourdissait son coeur écrasait aussi les collines et les arbres. En même temps que ses espoirs, le pittoresque du pays avait l'air d'avoir fondu : moins magiques, les couleurs des vallées, moins poétiques, les rugissements des torrents ! Son Fouta venait de lui échapper, son Fouta ne serait plus jamais le même. Seul et en proie à un effroyable abîme, il avançait, tête baissée, pas du tout pressé d'arriver à Kahel.

***

« Avez-vous entendu, bonnes gens ? Ils ont décapité l'Almaami. Le soleil est toujours là au-dessus de nos têtes et pourtant le Fouta n'existe plus ! »

Maintenant, il se trouvait dans les environs de Fougoumba et il écoutait distraitement les choeurs des pleureuses et les mugissements des troupeaux. II lui restait à traverser le Téné, à passer la plaine de Keebali et les éboulis de Diambouria… A Pooredaka, on s'était quittés sans se dire adieu : chacun de son côté comme après une partie de chasse qui avait mal tourné. Il avait sagement attendu la fin de la bataille avant de sortir du bois. En le voyant arriver, un officier avait aussitôt donné l'ordre de faire feu. Le contre-ordre de Beckmann l'avait sauvé de justesse. Il ne lui restait plus, alors, qu'à quitter le champ de bataille, sous les quolibets de son ennemi intime : Beckmann avait gagné, plus insupportable encore, il lui avait sauvé la vie. Il s'était dirigé vers Sankarela sans se préoccuper du chemin qu'avaient pris les autres.
Il cheminait tristement, la bride de son cheval à la main et derrière lui seulement trois boys pour porter ses habits, ses médicaments et ses vivres. Cela faisait deux ou trois jours maintenant et il n'était toujours pas arrivé à Kahel — à croire que le rythme de sa marche s'était brisé ou que les sommets de Kahel s'étaient mis à s'éloigner à cause de la catastrophe de Pooredaka, sûrement.

« Mes amis, le Fouta s'est envolé ! Un tas de poussière emporté par le vent ! La'ilâha i'lallâhou ! Ils on tué l'Almaami et son trésor a disparu ! »

Postés à l'entrée des villages, les gens le regardaient se traînasser, sans lui adresser la parole. Ceux qu'il croisait au détour du chemin et sur les berges des rivières se détournaient et disparaissaient comme des ombres dans la touffeur des végétaux. Assurément, ils n'étaient pas contents de lui. Lui non plus n'était pas content de lui. D'ailleurs il n'était content de personne. Le Fouta devenait une drôle de maison où personne n'était content de personne. Bookar-Biro était mort. C'est ce que tout le monde souhaitait et maintenant chacun avait l'air de regretter quelque chose, à commencer par lui, Olivier de Sanderval… On avait bien débouché sur une issue, mais une issue qui ouvrait sur l'abîme ! Hier, les choses étaient simples, aujourd'hui, plus rien n'était sûr : ni les pactes, ni les idées, ni les amis.
Un morbide sentiment de malaise et de doute l'oppressa tout le long du chemin.

« Et vous savez quoi, bonnes gens ? Le trésor de l'Almaami a disparu. Ils ont tué l'Almaami et son trésor a disparu ! »

Son chemin grouillait de fantômes, les mots qu'il entendait ne s'adressaient à personne.

***

Il s'attarda quelques jours à Kahel pour payer ses soldats et ses paysans, accélérer les chantiers et surveiller le début des récoltes. Il en profita surtout pour nettoyer sa tête et réarranger ses idées. L'angoisse de l'avenir lui devenait plus insupportable que l'insomnie. Tout s'éloignait, tout devenait hostile ou inconnu. Personne à qui se fier, aucune idée en tête ! Ses longues promenades dans les landes et la chasse à la perdrix n'y changaient rien. Georges et Mangoné Niang eurent bien du mal, cette fois, à le sortir de ses longs moments d'abandon meublés de soliloques véhéments et mystérieux.

« Ils ont décapité l'Almaami ! Qu'ont-ils fait de l'or de Bookar-Biro ? »

Il n'était pourtant pas homme à se laisser abattre, enfin, en d'autres temps tout au moins ! C'était un buffle, au physique comme au tempérament, qui n'hésitait pas à ruer quand le danger s'annonçait : il serait né à Labé ou à Timbo, c'est à cet animal-là que les devins auraient associé son âme. Cette fois-ci, cependant, tout se ramollissait en lui. Certains moments la mort le tentait, l'idée lui venait de s'abandonner à l'ivresse du néant, de répondre à l'appel des flots grondant dans les précipices.

« Qui sait ce qu'ils ont fait de l'or de Bookar-Biro ? Où se trouve donc le trésor de l'Almaami ? »

Un obscur prince du nom d'Oumarou Bademba fut hissé sur le trône. Chaudié, gouverneur général, vint spécialement de Saint-Louis pour entériner cela… Les bruits des événements lui parvenaient avec la même pitoyable insignifiance que le pépiement des calaos ou le vrombissement des abeilles.
Seulement la réalité ne tolère pas qu'on l'ignore trop longtemps.
Un lundi matin, trois jeunes cavaliers venus de Labé arrivèrent, à l'improviste, pour le tirer de son aboulie :
— Yémé, Alfa Yaya, Tierno et Ibrahima sont réunis à Labé ! Ils nous ont dit de venir te chercher.
Il s'ébroua et sortit de son état un peu comme on sort du lit après une longue journée de paresse. Il se leva, appela son fils et suivit les trois jeunes messagers, sans se douter qu'il ne reverrait plus jamais Kahel.

***

A Labé, ils avaient tous des gueules d'ennemis. Quand il arriva, Tierno se détourna, Ibrahima fit semblant de psalmodier et le regard d'Alfa Yaya ne disait rien d'humain :
— Je viens d'apprendre qu'un certain Bonnassiès arrive pour prendre le commandement du poste de Labé. Le poste de Labé ! Je le recevrai avec mon fusil, Yémé ! Je n'ai pas sorti ma terre des griffes de Timbo pour l'offrir aux Blancs ! Mais pour qui vous prenez-vous, bon Dieu ?
Tierno aussi, et c'était bien rare, avait du mal à garder son calme :
— Je ferai la même chose à Timbi-Touni !
— C'est trop tard, bien trop tard, parents ! Je vous avais prévenus ! grinça la voix épouvantable de Ibrahima. Allaahu akbar, la foudre que je craignais, c'est celle-là même qui est tombée ! Maudite, maudite, maudite époque !
— Vos tirailleurs traversent mes terres sans me demander mon avis ! reprit Tierno.
— Vous ? Pourquoi, pourquoi vous ! s'indigna Sanderval.
Ce fut la voix impitoyable d'Alfa Yaya qui lui répondit :
— Ce sont tes frères, Yémé ! Des Blancs comme toi !
La torture dura près d'une heure avant qu'il n'explose, à son tour :
— Adressez-vous donc à Ballay, bergers malhonnêtes et invivables ! C'est lui, le gouverneur ! C'est lui, le Blanc ! Moi, je suis un Peul, un Peul comme vous !
— Ah oui ? Quand il pleut, tu es blanc, quand il fait sec, tu es noir et quand il vente, tu n'es plus personne. Je connais ce genre d'animal, cela s'appelle le caméléon. J'aurais dû t'écraser avec mon pied le jour même où on s'est rencontrés, rugit Alfa Yaya.
Voyant que les choses s'envenimaient dangereusement, Tierno reprit le visage que le Blanc lui connaissait :
— Patience, parents, patience ! A quoi ça peut bien mener de nous engueuler ? Nous sommes suffisamment dans les ténèbres pour refermer davantage les portes. Ce qu'il nous faut, c'est une solution et elle est dans tes mains, Yémé. Rends-toi à Conakry, parle à Ballay !
— A Ballay ? Que veux-tu bien que je lui dise ?
— Dis-lui, dis aux gens de ta race de respecter leurs engagements : l'amitié, le commerce, rien d'autre que ça! — Sinon, nous prendrons les fusils ! Dis-lui ceci, au gouverneur : qu'il s'occupe de ses affaires à Conakry et nous, des affaires du Fouta ! Qu'il envoie juste ses tissus et ses perles et il aura en échange les peaux de vache et la cire ! Tu réussiras à lui faire comprendre ça ?
— Je vais essayer, Alfa Yaya, seulement, pour eux, je suis Peul !
— Et tu l'es vraiment ?
— Vous ne me croirez jamais et pourtant, à force de dévaler vos pentes, de m'empiffrer de fonio et de lait caillé, de tricher et de mentir, à force de m'imprégner de vos vilaines moeurs de nobliaux effarouchés !… Mais bon, ça ne regarde que moi ! Vous n'êtes pas obligés de me croire et pourtant, moi aussi, je suis un Peul ! Et le pire, c'est que je trouve cela plutôt délicieux !
Tierno détourna les yeux. Ibrahima cessa de renifler. Alfa Yaya soupira longuement, puis se racla la gorge comme pour débarrasser sa voix de sa crasse de colère et de ressentiment, puis il tendit sa main au Blanc :
— Tu te souviens de ce que je t'avais dit près de la rivière, Yémé ?
— Tu m'avais dit : « Ce matin est prodigieux, sois mon ami, étranger ! »
— Eh bien, Yémé, les événements n'ont qu'à se produire, ces mots-là tiendront toujours !
Ils se quittèrent là-dessus. On tua un mouton pour nos deux Blancs, on les hébergea dans une dépendance du palais. Le lendemain, on les escorta jusqu'à la rivière Kokoulo. Mais, au moment des adieux, Alfa Yaya reprit sa mine terrifiante de roi :
— Ecoute, Yémé, si les Blancs s'emparent du Fouta, je leur ferai la guerre ! N'oublie jamais ça, Yémé !

***

Il piqua droit sur Conakry sans repasser par Kahel. Tierno avait raison, il devait parler à Ballay, et au plus vite. C'est cette idée-là qui aurait dû lui venir en tête dès après la bataille de Pooredaka. Seulement, à ce moment-là, son esprit engourdi ne pouvait percevoir cette évidence. Cela faisait tant de choses que la mort de Bookar-Biro laissait en suspens ! Le Fouta serait-il un protectorat ? une colonie ? Serait-il autonome, ou intégré à la Guinée française, voire au Sénégal ou au Soudan ? Et ses traités, dans tout ça ? Il fallait hâter le pas. Il fallait arriver à Conakry avant que Ballay ne soit appelé à Saint-Louis ou dans quelque lointaine province. Il fallait le persuader de ménager les princes Peuls pour éviter la catastrophe, surtout que maintenant les maladresses de cet imbécile de Beckmann avaient mis en alerte la panthère Alfa Yaya.

« Si les Blancs s'accaparent du Fouta, je leur ferai la guerre ! »

Une menace d'Alfa Yaya, ça ne devait jamais se prendre à la légère !

***

La terreur régnait à Tianguel, sa première étape après les falaises de Guémé-Sangan. Plus personne n'osait sortir la nuit : « Une sorcière hante les lieux », lui dit de son air le plus sérieux le chef du village.
— Ah, vous les Peuls, avec vos histoires à dormir debout !
— Ce n'est pas un mensonge, Yémé ! Je l'ai vue de mes propres yeux, avec ses cheveux ébouriffés et ses yeux injectés de sang. Tu peux vérifier vers la fontaine-aux-roseaux, c'est par-là qu'on la voit rôder.
— J'ai mieux à faire, je dois m'assurer de mon itinéraire et reposer mes vieilles jambes en vue de la redoutable étape de demain. On dit que le Konkouré est en crue et nous devons le traverser.
Mais le lendemain, en passant près de la fontaine-aux roseaux avec sa petite colonne, la scène à laquelle il assista le révolta tant et si bien qu'il en laissa tombrer son ombrelle. Une horde de gamins surexcités lapidait une pauvre femme en haillons, couverte de plaies, les narines bouchées par la morve.
— Va-t'en d'ici, vieille sorcière !
Il arracha vite un fouet à la brousse et éparpilla les gamins, puis il se tourna vers la pauvre femme pour l'aider à se relever. A ce moment-là, une fulgurante décharge lui traversa l'épine dorsale et l'immobilisa dans une raideur de statue. Il aspira une grande bouffée d'air et enfin parvint à crier :
— Dalanda !
— Yémé !
Aucun doute, c'était bien elle ! La déchéance n'avait pas fini de l'altérer. Elle arborait toujours son joli teint cuivré, son regard éclatant et sa silhouette divine.
— Emmène-moi avec toi, Yémé ! Jon Koyin est mort. Son demi-frère a hérité de tout ; le trône, les troupeaux, les femmes.
— Il t'a chassée ?
— Il dit que je suis trop vieille, il dit que je n'ai jamais eu d'enfant. Emmène-moi, Yémé !
Il regarda ses hardes, ses narines tachées de sang et la grosse bosse au milieu de son front.
— Emmène-moi, Yémé !
Il se tourna vers ses porteurs, déballa une ou deux caisses, sortit du corail et de l'ambre pour surcharger ses bras.
— Je t'en prie, Yémé, emmène-moi !
Il s'embrouilla davantage, retourna de nouveau vers les caisses et lui ramena du chocolat :
— C'est du Marquis, précisa-t-il, contaminé par les frissons et les tremblements de la pauvre femme. Tu aimes toujours le Marquis ?
Mais il réalisa la présence de Georges et cela démultiplia son désarroi.
— Qui est cette folle, papa ?
— C'est… c'est comme tu dis, une folle ! Une folle que j'ai connue jadis et qui est de plus en plus folle… En avant ! hurla-t-il en se plaçant à la tête de la colonne sans oser jeter un dernier coup d'oeil sur Dalanda qui continuait de crier derrière lui :
— Emmène-moi, Yémé, emmène-moi !

***

Il marcha tout le long de la joumée sans ouvrir la bouche, s'efforçant d'éviter le regard de son fils et de repousser la déferlante de pensées sombres qui assaillait son esprit et menaçait de l'engloutir. Ses barrières cédaient de tous côtés. Il avait beau s'accrocher aux souvenirs les plus gais de sa drôle d'existence, il ne pouvait empêcher sa volonté de flancher. La décrépitude de Dalanda ne disait pas simplement l'impossibilité d'un amour, elle annonçait aussi la fin du rêve — les limites de l'absolu, pour parler comme lui.
Le crépuscule les rattrapa avant qu'ils ne traversent le fleuve. Le Konkouré n'avait pas décru malgré le début de la saison sèche : impossible de le traverser, la nuit naissait déjà. Ils campèrent dans une clairière qu'un talus de latérite protégeait du margouillis de la berge. Le contrecoup, comme lors du repas empoisonné de Sokotoro ? Il sombra dans un profond sommeil dès qu'il ôta ses bottes. Mais il se réveilla au milieu de la nuit, affolé par les cauchemars et suffoquant comme une bête asphyxiée. Il sortit de la tente, la main sur la poitrine et hurla comme s'il allait recracher ses poumons :
— De… l'air ! Georges… par pitié… de l'air !
Son fils réussit difficilement à le calmer et à le ramener dans son lit. Il lui épongea le front, lui massa la poitrine et se battit fébrilement avec la boîte de pharmacie pour lui trouver des pastilles et des lotions. Tout rentra dans l'ordre. C'était la joumée des miracles, car il se remit aussitôt à ronfler. Le reste du voyage se passa sans anichroche, mis à part la routine des chutes, des ankyloses et des inévitables coliques. Il fila vers le palais du gouverneur dès qu'il arriva à Conakry. Il trouva Ballay dans son bureau en train de compulser nerveusement ses dossiers, son éternelle règle à la main. Les salutations furent rapides, sans chaleur, et les propos tout de suite crus :
— Ah, ce vieux Sanderval ! Votre compagnie ne me plaît pas particulièrement, mais je vous préfère ici, à côté de moi, que là-bas dans votre insaisissable Fouta !
— Mais c'est presque une marque d'estime, gouverneur !
— Bon, qu'est-ce qui vous amène ?
— Quelle question ! Dire que je m'attendais à ce que vous m'invitiez à venir discuter.
— De l'avenir du Fouta ? Il ne vous concerne plus, l'avenir du Fouta.
Tous ces événements s'étaient produits pour rien : les deux hommes restaient diamétralement opposés. La conversation reprit vite ses accents polémistes et sa tonalité enflammée. Olivier de Sanderval essayait de faire comprendre que le Fouta devait rester autonome et que, en s'alliant avec des hommes comme Alfa Yaya, la France pouvait durablement s'installer par ici. Le roi de Labé, elle devait l'aider à sortir de la tutelle de Timbo et non le monter contre elle.
Ballay, au contraire, voulait dissoudre le pays peul dans sa colonie.
Il comptait réduire le pouvoir de Timbo. Il n'y aurait plus un Almaami mais deux : un à Timbo et un autre à Dabola.
Quant à la province de Labé, il comptait la faire éclater en cinq morceaux.
— Chacun de ces Peuls aura son royaume, comme ça tout le monde sera content.
Quant aux traités de Sanderval, il n'en serait plus jamais question. La France généreuse et éternelle lui concédait cinq mille hectares de terre dans la vallée de la Kolenté, en pays soussou.
— En échange, vous devez oublier le Fouta-Djalon. Je vous interdis d'y retourner !
— Le Fouta-Djalon, c'est chez moi !
— Le Fouta-Djalon n'existe plus, Olivier de Sanderval. Nous sommes en France, et ici, la France, c'est moi !
Il laissa le pauvre homme casser sa règle et suffoquer de colère avant de gagner la sortie.

***

Dans la cour, Georges, qui l'attendait au milieu des bagages, lui apprit en sanglotant qu'on venait de dévaster leur domaine de Kaade. Ils rechargèrent leurs malles malgré tout et, suivis de leurs porteurs et de leurs boys, reprirent immédiatement les chemins escarpés du Fouta. Mais, à la hauteur de Gongon, ils se heurtèrent à une colonne de tirailleurs commandée par un jeune lieutenant français aussi imberbe qu'arrogant :
— J'ai ordre de ne pas vous laisser passer ! Et n'insistez pas, je serais obligé de tirer.
— C'est Beckmann ou c'est Ballay ?
— C'est la France, monsieur !
Il regarda son fils comme pour lui dire : « Nous sommes des Olivier ! Usons de nos armes ! Passons ! » Mais celui-ci remua tristement la tête pour le dissuader :
— Laissez, père ! Nous reviendrons une autre fois.

arrow-previous arrow-up arrow-next



Facebook logo Twitter logo LinkedIn Logo