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Taariika / Histoire


Thierno Mamadou Bah
Histoire du Fouta-Djallon : des origines au XXe siècle

Conakry : Société africaine d'édition et de communication. 1999. 182 p. : ill.
Préface et notes de Djibril Tamsir Niane


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Chapitre XVIII
Les groupements religieux

Introduction

L'étude des groupements religieux au Fouta-Djallon permet de se rendre compte de la marche irrésistible des Peuls vers l'objectif que leurs ancêtres ont visé : l'expansion de l'islam dans le pays.
La création du royaume théocratique au XVIIIe siècle permit aux marabouts de se mettre en rapport avec l'extérieur. Les relations qu'ils établirent avec leurs homologues étrangers eurent pour résultat l'introduction dans le pays de nouveautés religieuses. Désormais, ils ne se cantonnèrent plus seulement à la lecture quotidienne du Coran ou à l'exécution des cinq prières obligatoires, mais ils apprirent de nouveaux chapelets, et matin et soir, ils récitaient des litanies spéciales, d'un modèle nouveau : le Wird.
Le Wird est un ensemble de litanies que le fidèle, initié par un maître, s'impose volontairement de réciter, à des heures fixes, pour invoquer le Créateur afin qu'Il le guide dans la bonne voie.
Les premiers marabouts conquérants et leurs disciples s'étaient affiliés à la Qadria venue d'Afrique du Nord, pendant leur migration.

Plus tard, un éminent marabout, un Wali, Thierno Aliou Soufi, partit de Kansa-Gâwol, près de Popodara (Labé) pour Fez au Maroc, où il compléta ses études islamiques et se forma dans la science mystique. Il s'affilia, dès son arrivée dans cette ville, à la Chadelia qui, à l'époque, était inconnue dans le Fouta. A son retour, il entreprit une vaste propagande grâce à laquelle il initia une bonne partie des fidèles de sa région. Dans la première partie du XIXe siècle cette voie devint la mode dans tout le Fouta 1.
C'est quelque temps après qu'arriva El Hadj Oumar avec la Tidjania. Ce grand conquérant visita la plus grande partie du pays, notamment le Labé. Une campagne intelligemment menée attira vers lui les Peuls, avides de nouveauté, et la Tidjânia s'implanta en éclipsant, peu à peu, ses devanciers, la Qadria et la Chadelia.
Au moment de l'occupation française, trois groupements étaient installés dans le pays : la Qadria, la Chadelia et la Tidjania.
Les pages qui vont suivre s'attachent à décrire l'évolution de chaque groupement avant, pendant et après cette occupation.

La Qadria

Fondé par Cheikh Abdoul Ghadiri Jiaylani, la Qadria est la voie la plus ancienne introduite dans le Fouta. Après les premiers conquérants, elle fut peu développé chez les Peuls. Par contre les Diakankés, sous la direction de Karamba Gassama de Touba, qui fut initié avant son arrivée dans le Fouta, en furent des adeptes fervents.

Le Groupement de Touba

De Dienné où il avait fait ses études religieuses, Karamba Gassama était d'abord venu à Kankan, puis à Timbo. Sur l'autorisation de l'Almamy et de l'Alfa mo Labé, il fonda le village de Touba Bakoni, dans le Woora (Mali). Mais par suite des incursions que ses voisins tandas faisaient dans son village pour tuer ses talibés et piller leurs biens, il dut abandonner ce village et s'installer dans le Binâni (Gaoual) où il créa un nouveau village qu'il appela encore Touba.
Il y mourut à l'âge de 89 ans. Il laissa 12 enfants dont le sixième, Mamadou Taslimi, hérita de sa science et resta fidèle à la Qadria, qui fut adoptée par tous les élèves de son école. Cet héritier fut, comme son père, un savant et, sous son autorité religieuse, la Qadria fut aussi florissante qu'à l'époque du défunt. Lors d'un voyage qu'il effectua dans le Sahel, il reçut une confirmation de son affiliation par Cheick Abdoul Latif Kounti ainsi que par Mohamed Khalif, fils de Cheick Sidia el Kabir de Trarza (Mauritanie). A la mort de Mamadou Taslimi, le plus brillant de ses fils, Karamoko Koutoubou prit sa succession.
Né vers 1830, Karamoko Koutoubou, du nom arabe Abdoul Gadiri, reçut de son père l'initiation à la Qadria. Il quitta Touba une seule fois, en 1860, pour un voyage en Mauritanie où il fut confirmé par Cheick Sidia el Kabir. A son retour à Touba, il lança une grande campagne afin d'élargir les horizons de la Qadria et, grâce à ses connaissances et ses vertus, le rayonnement de son Wird grandit. Tout les étudiants et les Dioula colporteurs s'y affilièrent et Touba prit un essor remarquable pour devenir la ville sainte de la région. C'est depuis que le marabout fut surnommé Karamoko Koutoubou (pôle d'attraction). Il mourut en 1905, laissant neuf enfants ; c'est le second, Mamadou Taslimi, surnommé Karamoko Sankoun, qui le remplaça à la tête de la confrérie et hérita de son influence spirituelle.
Karamoko Sankoun fit ses études auprès de son père Karamoko Koutoubou qui lui donna un enseignement très solide. Dès la fin de ses études supérieures, il ouvrit une école à Touba ; et depuis, son père se reposa sur lui et lui confia les cours qu'il donnait à ses talibés. Sa réputation de savant et de maître incontesté ne cessa de grandir dans tout le Fouta. Les habitants de Touba se réjouirent d'avoir un successeur aussi vaillant et aussi digne pour continuer l'oeuvre de leur vénéré maître, Karamoko Koutoubou.
Karamoko Sankoun reçut l'initiation à la Qadria des mains de son père et après la mort de celui-ci, il rendit visite à Cheick Sidia en Mauritanie, avec le désir de faire confirmer cette initiation. Il obtint satisfaction et à son retour à Touba, il reprit la distribution du Wird à tous ceux qui venaient à lui. Dans le Touba et dans les environs immédiats de la Casamance, de la Gambie et de la Guinée portugaise, la Qadria se répandit.
Karamoko Sankoun, comme son père, eut de très bonnes relations avec Alfa Yaya, roi du Labé, auquel ils servirent, tous deux, de conseillers. Ils usèrent de leur influence religieuse pour s'entremettre dans les conflits entre le roi et ses sujets. Aussi, Alfa Yaya leur témoigna-t-il un grand dévouement et une sincère amitié.
Mais, en 1910, Karamoko Sankoun fut compromis dans l'affaire du Wali de Gomba. Il fût arrêté le 30 mars 1911 avec plusieurs parents pour être interné à Port Etienne (actuellement Nouadhibou), en Mauritanie, où il retrouva son ancien ami, Alfa Yaya et son fils, qui l'y avaient devancé, ainsi d'ailleurs que les anciens talibé du Wali de Gomba. Ensemble, ils formèrent une petite colonie d'exilés dont la direction religieuse fut confiée a Karamoko Sankoun.
L'arrestation de ce maître porta un coup sérieux à la Qadria qui connut un net recul. La Tidjania introduite au Fouta finit par s'imposer et, en peu de temps, les Diakankes restèrent seuls fidèles à la Qadria.

La Chadelia

On présume que c'est à la fin du XVIIIe siècle que la Chadelia fut introduit au Fouta. Thierno Aliou Soufi de Kansa-Gâwol, près de Popodara (Labé) en fut l'apôtre fervent.
Ce marabout, de la famille Seeleyaɓe, avait fait ses premières études près de son père ; puis, pendant sa jeunesse, il se rendit à Fez, au Maroc, pour les compléter auprès de son homonyme, Ali Soufi el Fassi.
Il revint ensuite dans son pays natal où, grâce à une propagande active, il attira à sa voie la majorité des Foula, qui pratiquaient la Qadria. Après avoir attiré de nombreux disciples dans le Labé, il se rendit auprès des Almamys, à Timbo, où il demeura jusqu'à sa mort. Il fut enterré à Dara près de Timbo. Sa tombe fait l'objet de pèlerinages fréquents.
La Chadélia exige la récitation quotidienne d'un nombre important de litanies ; à cela s'ajoutent plusieurs autres disciplines dont les plus importantes sont : le jeûne, l'isolement, la prière en commun et le Dyaarore, pratiqué dans la nuit du jeudi au vendredi, à haute voix, sans arrêt, par des chants à la louange du Prophète et demander au Tout-Puissant des bénédictions en sa faveur. Cette réunion rassemble, généralement, tous les adeptes et donne occasion à des distributions de cadeaux à l'initiateur et aux pauvres.
A la mort de Thierno Aliou Soufi, ses disciples se répartirent en trois groupes : N'Daama, Gomba et Zâwia.

La Tidjania 7
La Tidjania, contrairement à ses devanciers, est une voie très simple tolérante, libérale et facile. Il a été fondé par Cheick Ahmadou Tidjani, descendant du Messager de Dieu, le Prophète Mouhammad.
Né a Aïna Madhi, en Algérie, i est mort et enseveli à Fez, au Maroc.
La Tidjania est une voie qui est à la portée de tous, hommes, femmes, enfants, riches, pauvres, etc., enfin à tous les fidèles qui en acceptent les conditions très élémentaires parmi lesquelles nous citerons deux qui sont essentielles :

La Tidjania est composée de wirds qui se répartissent en trois catégories :

L'initiation à la Tidjania s'opère par une poignée de la main droite que l'initiateur donne à l'élève durant la récitation d'un certain nombre de litanies introductives.
La Tidjania, sauf cas spécial, condamne l'isolement. Bien au contraire, il recommande l'exhibition des saints afin de faire profiter les fidèles de leur baraka.
La Tidjania est intransigeante en matière de jeûne obligatoire. Elle est moins exigeante pour le jeûne facultatif et laisse liberté entière aux fidèles pour le faire à leur gré.
Le Dyaroore n'est pas une condition dans la Tidjania. Les anciens adeptes des confréries antérieures qui y sont intégrés gardent la faculté de le continuer ou de l'abandonner.
Dès l'introduction de la Tidjania dans le Fouta par El Hadj Oumar Tall, les Foula s'initièrent en grande masse. Le Labé, plus profondément islamisé, en fut un berceau ; et, satisfait de cette situation, El Hadj Oumar y séjourna pendant quatre ans pour propager son Wird, qui s'épanouit très largement dans toutes les autres provinces.
Après ce séjour dans le Labé, El Hadj Oumar effectua un périple à travers les diiwe de TimbiTouni, de Kollâdhe et rentra à Timbo. Partout, la même réception cordiale et respectueuse lui fut réservée. Malgré l'inquiétude que sa présence au Fouta causa aux chefs, sa popularité ne cessa de grandir au fur et à mesure que son séjour se prolongeait. Il conféra à de nombreux marabouts le pouvoir d'initiation, le Muqaddam, ainsi d'ailleurs que celui de transmission à certains. Ainsi, la Tidjania se répandit très rapidement dans le pays.
C'est alors qu'il se constitua, dans plusieurs provinces, des groupements sous l'obédience d'un marabout nanti du titre de Muqaddam.

Les autres foyers islamiques
En dehors des groupements cités dans les chapitres précédents le Fouta Djallon a compté également dans chaque diiwal des foyers islamiques dirigés par d'éminents marabouts. Ceux-ci ont apporté eux aussi leur contribution à l'islam. Celle-ci a consisté en l'ouverture d'écoles pour l'enseignement, la formation des guides de la religion et la participation aux diverses expéditions contre le fétichisme, etc. Les marabouts les plus célèbres sont les suivants :

Thierno Abdourahmane Nduyeedyo
Il arriva dans le Labé tout jeune avec son père Thierno Malal Nduyeedyo. Thierno Mamadou Cellou, chef du diiwal, habitait alors Demben. A la mort de Thierno Malal, Thierno Abdourahmane le remplaça comme Imam de la mosquée et chef des Nduyeebhe.
Dans sa fonction d'Imam comme celle de chef de famille, Thierno Abdourahmane resta un marabout très fervent et contribua largement à l'affermissement de l'islam dans le pays. Dans son école, il enseignait le Droit et diverses disciplines sur la religion.
Il eut sept garçons qui furent d'éminents marabouts. On peut citer : Idrissa, Ismâila, Mamadou Bano et Mamadou.
Ismâila se rendit à Timbo avec Thierno Aliou Soufi, chef de la confrérie Chadelia. Très instruit en arabe, il composa plusieurs poèmes sur les épopées des neufs Karamoko fondateurs du Fouta-Djallon. Dans le Labé, son école fut très florissante et fournit plusieurs adeptes qui furent de solides boucliers de l'Islam.
Idrissa ne fut pas moins actif dans le combat en faveur de la religion. C'est de son école qu'est sorti son premier fils, Thierno Abdoulaye Nduyeedyo, connu et célèbre par son instruction, sa dévotion et sa piété.
De son côté, Mamadou Bano fut très apprécié pour sa piété. Sa descendance, dont est issu Thierno Aliou Bhoubha Ndiyan, fut un exemple de sagesse et de droiture.
Ahmadou, très pieux, forma également des disciples très valeureux et très dévoués à la cause de l'islam.

Thierno Sadou mo Dalen
Thierno Sadou mo Dalen est du clan Seeleyabhe ; il fonda le village de Dalen. Il fût un marabout très vénéré, un poète de talent et un conseiller juridique très compétent. Très tôt, il ouvrit une grande école à Dalen. Il y reçut de nombreux enfants du Fouta-Djallon auxquels il dispensa un enseignement très solide. Sa réputation fut telle que son nom servit de caution à tous ses talibé qui, à travers le pays, jouissaient de l'estime des habitants.
Comme poète, il fut l'auteur d'un grand nombre de poèmes sur la morale, la culture etc. Son livre sur les « Successions » reste très célèbre dans tous les milieux intellectuels. Voici d'ailleurs, les conditions dans lesquelles il entreprit ce travail de si bonne qualité.
Des marabouts du Fouta, jaloux de sa grande popularité, taxèrent Thierno Sadou de chansonnier, auprès de l'Almamy Oumarou. Celui-ci décida de le mettre à l'épreuve ; il s'informa auprès des marabouts de Timbo pour savoir la matière la plus difficile dans les diverses branches de la religion ; il lui fut répondu que le Fiqh (droit) était le plus compliqué, et que dans cette matière, les « successions » étaient la matière la plus difficile à comprendre. Il convoqua donc Thierno Sadou à Timbo et lui demanda gentiment de lui composer un poème sur les « Successions », en s'inspirant du livre de Khalil.
Thierno Sadou comprit très vite qu'il s'agissait là d'un piège. Rentré chez lui, il se mit au travail et remit à l'Almamy un pur chef-d'oeuvre, comme on va le voir.
Dès réception de la réponse de Thierno Sadou, Almamy Oumarou convoqua tous les marabouts qui l'avaient critiqué. Tous furent incapables de comprendre le texte de Thierno Sadou. C'est alors que l'Almamy invita l'auteur à Timbo et convoqua tous les marabouts du pays qui écoutèrent le docte Thierno Sadou. A partir de ce moment, tous le reconnurent comme un maître incontesté dans tout le Fouta-Djallon.
Lors du passage d'El Hadj Oumar dans le pays, Thierno Sadou fut le plus valable de ses interlocuteurs et le grand conquérant n'eut qu'à se féliciter d'avoir rencontrer une si grande sommité. C'est après que Thierno Sadou l'ait tranquillisé sur les intentions de El Hadj Oumar, que l'Almamy de Timbo, Almamy Oumarou, autorisa son « homonyme » à traverser le pays. C'est également Thierno Sadou qui eut l'honneur de répondre au discours d'adieu de El Hadj Oumar lors de son départ de Timbo. Ce discours comportait une énigme que Thierno Sadou déchiffra, comme on l'a vu.
Tous ces faits montrent, si besoin en était, le haut degré d'instruction de cet homme.
La descendance de Thierno Sadou ne fût pas nombreuse ; nous citerons seulement Thierno Mouctar.

Thierno Bakar Poti de Lelouma
De par sa grand-mère paternelle, Aissata, il est descendant d'Alfa Mamadou Cellou, chef du diiwal de Labé. Du clan Seeleyabhe, comme Thierno Sadou mo Dalen, il fut un marabout très instruit et très pieux. Il rédigea, sous forme de poésie, un livre de météorologie nationale. Son livre fut le bréviaire de l'agriculteur et de l'éleveur 10. A sa mort, son fils, Modi Bakar Bhôyi, lui succéda et hérita de son talent. Il poursuivit inlassablement l'oeuvre de son père et obtint des résultats remarquables. Pour leur formation littéraire, il faut signaler Thierno Aliou Bhoubha Ndiyan parmi les grands marabouts formés à son école.

Thierno Samba Mombeya
Thierno Samba Mombéya a un lien familial avec Thierno Sadou Dalen et Thierno Bakar Poti : leur aïeul, Modi Abdoulave, épousa la première fille de Alfa Mamadou Cellou, chef du diiwal de Labé. Il porta le titre de Thierno tout jeune et fut désigné Thierno Samba Mombéya. Il fit de solides études dans son village natal. Après quoi il décida de faire une pérégrination entre les marabouts afin de consolider ses connaissances. Il fut un grand poète en arabe et en pular. Il se rendit plusieurs fois en Mauritanie. Grâce à ces voyages, il acquit une riche expérience des milieux islamiques ; ce qui lui permit de constater que l'enseignement qu'il a reçu dans son village était excellent. Il honora son maître en reprenant ses études auprès de lui. Plus tard, il reprit sa liberté et entreprit la création, sur autorisation de celui-ci, d'une école à Mombeya.
Malheureusement, par suite du travail intense qu'il effectuait dans son école, sa santé fut ébranlée. Sa tête enfla ; ce qui l'obligea à abandonner l'enseigneinent pour se consacrer à l'isolement mystique (Khalwa). Pour tuer l'oedème de sa tête, des guérisseurs lui donnèrent le conseil de chiquer du tabac ; on pensa dans son entourage que ce procédé aurait pour résultat, l'extinction de son « illumination». Il l'utilisa cependant ; et l'oedème diminua ; il ne perdit nullement son pouvoir spirituel et continua pendant une longue période, l'usage du tabac, mais l'abandonna brusquement par suite d'un incident banal survenu dans son ménage. En effet, un matin, une de ses servantes lui demanda du tabac. Il lui répondit qu'il lui en manquait. Thierno Samba s'étant absenté de sa case quelques instants après, la servante y penétra et déroba un peu de tabac. Dès son retour, il constata le vol ; choqué par cet acte, il dit : « Je n'ai rien de commun avec cette servante si ce n'est le tabac ; j'abandonne donc le tabac. »
Ce fut une erreur, car l'oedème reprit aussitôt. Thierno Samba refusa de chiquer et sa tête enfla à nouveau, à tel point qu'il perdit la vue. Cependant son influence religieuse n'en souffrit nullement. Il continua ses activités comme par le passé. Il acheta un âne pour ses déplacements et recruta son petit-fils comme secrétaire.
Thierno Samba Mombéya écrivit de nombreux poèmes sur la religion. Son livre le plus célèbre est le Madîna, poème en pular dans lequel il traduit le droit musulman. Il est très connu et apprécié dans les milieux intellectuels du Fouta-Djallon.
Thierno Samba perdit tous ses enfants avant sa mort. Ses petit-fils aussi ne reçurent aucune instruction par suite de la maladie de leur grand'père. De ce fait, il n'eut aucun héritier spirituel. On rapporte que cette perte est due à un incident survenu entre lui et El Hadj Oumar lors de la visite de ce dernier à Mombéya. Dans toutes les assemblées où Thierno Samba eut à intervenir, il se fit remarquer par son talent et sa valeur spirituelle. Sa sainteté ne fut contestée par personne. Il fût un conseiller très écouté des Almamys et Chefs du Fouta-Djallon. Thierno Samba Mombéya mourut deux ans après Thierno Sadou Dalen vers 1852.

Notes
1. Tout l'Ouest africain est de rite malékite, au sein duquel évoluent plusieurs confréries, dont la Qadria qui gagna l'Afrique de l'Ouest à partir du Maghreb. On verra comment la Tidjania s'imposa à toute l'Afrique Occidentale.
2. A propos de ces évènements lire Le Ouali de Gomba.
3. Confrérie religieuse qui, comme la Tidjania, est originaire du Maghreb.
4. Alfa Mo Labé = Alfa (chef) de Labé.
5. Voir la thèse de Sékou Kaba, Institut Polytechnique de Conakry, 1968. Le Waliou de Gomba avait plus de 80 ans à soit arrestation. La peine de mort fut commuée en détention à perpétuité.
6. La Zaouia est une école, un centre coranique.
7. Consulter également La Tidjaniyya dans l'ouvrage de F. Dumont « L'anti-Sultan ou Al-Hajj Omar Tal du Fouta, combattant de la Foi ».
8. Parmi ses fils fonctionnaires, citons :

9. A partir de cette date, les Français installèrent un Almamy à Dabola (Branche Soriya) ; un Almamy à Mamou (Branche Alfaya). Timbo ne fut plus une capitale. Dabola à 70 km à l'est, Mamou à l'ouest à 70 km ; ces deux villes devinrent de grandes gares de chemin de fer. Ce dernier ayant évité Timbo, cette ville tomba et devint une simple bourgade.
10. Il serait intéressant de retrouver cet ouvrage qui nous apprendrait beaucoup sur les connaissances météorologiques et astronomiques des Peuls du Fouta-Diallon.