Collection Initiations et Etudes africaines
Dakar, IFAN, 1972. 276 pages
L'altitude générale du Fuuta lui permet de jouir du climat le plus doux, le plus salubre, et le plus humain de tout l'ouest fricain. Grâce à sa latitude et à sa position, le massif est fort arrosé en saison pluvieuse (correspondant à l'été de l'hémisphère nord) mais sans être privé de la salubre saison sèche (hiver boréal). Son altitude lui permet d'échapper aux funestes effluves de la basse côte atlantique. La fournaise du printemps soudanien ne le touche pas, mais il connaît en revanche, des températures aux matins de janvier et février exceptionnellement basses pour un pays tropical. Le contraste est frappant entre les hauts plateaux et les profondes vallées qui s'étendent à leurs pieds.
C'est par ces vallées que pénètrent, au Fuuta, les moiteurs funestes de la côte d'une part et l'atmosphère torride des contrées soudaniennes desséchant l'air du Fuuta de décembre à février, par le souffle du désert : l'harmattan. L'humidité est très grande à cette période de l'année. Certains jours de janvier, le thermomètre descend très bas : 7.5° voire jusqu'à 4° centigrades parfois à Mali, Labé et Dalaba. Au plus fort de la saison chaude, la moyenne des températures est de 22 à 27° sur les plateaux avec des exceptions cependant dans les vallées où elle peut atteindre 30° à 35°. Mais qu'est-ce à dire à côté de la moyenne de Bamako (Soudan-Mali) : 35 à 45° centigrades ! Si l'hivernage a lieu entre avril et septembre, les violentes tornades ne déversent leur maximum qu'aux mois de juillet et d'août. L'air chaud du Sahara qui atteint à ce moment le Fuuta provoque un appel d'air de l'Océan dont la grosse masse est rafraîchie par l'hiver austral. C'est ce phénomène d'appel cyclonique que l'on nomme la mousson. Alourdies d'eau tiède, les couches de sombres nuées se précipitent en vagues successives sur les murailles du massif montagneux. Elles déversent en quelques semaines, une quantité considérable d'eau sur la côte des rivières du sud : trois à quatre (3 à 4) mètres à Konakry, cinq à six (5 à 6) à Dubréka au pied du mont Kaakulima. Quand la mousson atteint le Fuuta, cette quantité initiale est réduite de près des deux tiers environ. Quelle que soit l'année, Dalaba reçoit 2.035 millimètres d'eau, Pita : 1.882, Labé : 1.764, Mali : 1.893 mm. Si Telimele, situé plus bas (dans la province de Timbi) en plein vent du sud-ouest (sur la trajectoire de la mousson), reçoit 2.470 mm (Tougué, province de Koyin), abrité au nord-est doit se contenter de 1.660 millimètres : ce qui est encore énorme. Les 1.660 mm de Tugé, en six mois, sont trois fois plus élevés que ceux de Paris en une année. Que dire alors, comparés aux 580 mm annuels de Dakar (Sénégal).
L'hivernage étant lié au phénomène de la mousson, vent d'ouest, le Fuuta occidental "au vent" est plus arrosé que le Fuuta oriental "sous le vent"1.
Le Fuuta occidental, en basse altitude, tout proche de l'océan reçoit la mousson directement, tandis que le Fuuta central l'abrite de l'harmattan.
C'est la région la plus chaude, la plus arrosée et la plus humide. Telimele, à l'altitude de 600 mètres reçoit 2.470 millimétres d'eau, la plus grande quantité de tout le massif. Cette région est une zone de transition entre le climat fuutanien et le climat guinéen. Rien d'étonnant à ce que ce soit la partie du massif la plus boisée.
Le Fuuta central, avec ses trois plateaux (Dalaba, Pita-Labé, et Mali) comportant ce qu'on pourrait qualifier de montagne, a un climat plus complexe. Les variations de celui-ci sont en relation avec les formes de relief (montagnes, plateaux, vallées). La vallée est plus chaude par opposition à la montagne. Les variations diurnes y semblent plus grandes que sur les hauteurs par opposition entre les maxima du milieu de la journée et les faibles minima du matin. Les très basses températures nocturnes et matinales peuvent, s'expliquer des deux manières au moins
D'une part, étant donnée la raideur des pentes, le phénomène d'inversion se produit.
D'autre part, comme il y a presque toujours un cours d'eau au fond des vallées, l'humidité ne manque jamais et le matin lorsque le soleil apparaît, une brusque évaporation abaisse soudain la température. Sur les hauts plateaux, Dalaba, altitude 1.150 métres, Pita: 960 mètres, Labé: 1050 mètres et Mali 1.464 mètres, reçoivent respectivement : 2.035, 1.882, 1.764 et 1.893 millimètres d'eau.
Le Fuuta oriental, situé entre 750 et 1.000 mètres, est relativement plus chaud que le Fuuta central. Ouvert par de larges vallées vers l'est et le nord-est, il est peu arrosé et moins humide avec des écarts de températures plus sensibles. Le climat soudanien y a plus d'influence que le climat guinéen ; c'est la région la plus exposée à l'harmattan. Ainsi Tuge (Tougué) à 900 métres d'altitude ne reçoit que 1.660 mètres d'eau, le chiffre le plus faible de tout le Fuuta.
Ainsi l'hivernage, survenant entre mai et septembre, se produit en plein été de l'hémisphère nord, lorsqu'on devrait enregistrer les fortes températures. Mais la rareté de l'insolation par suite de la couverture nuageuse, l'abondance de l'humidité et, en altitude, l'existence du brouillard décapitent la pointe de la courbe et la remplacent par une dépression qui se creuse vers la fin mai, atteint un minimum en août et remonte en octobre . L'amplitude diurne a son maxima en j anvier et son minima en août. La température en basse et moyenne altitude est en juillet-août légèrement supérieure à celle de décembre-janvier.
Avec un tel climat, comment s'étonner que les pasteurs Peuls venus des fournaises sahéliennes ne se soient pas laissés séduire ? Au surplus, l'eau ne manque jamais : du début à la fin de la saison sèche, le Fouta s'anime du murmure de ses sources et du grondement de ses écumantes cascades et les grès emmagasinent tant de pluies en hivernage 2.
Notes
1. Selon les expressions de J. Richard-Molard, o,c., p. 143 et 164.
2. J. Richard-Molard, 1953, p. 145.