… mais je fis une rencontre inoubliable : je découvris Gilbert Vieillard à travers son œuvre toute consacrée aux Peuls. Je me rappelle encore le respect ému que m'inspira la découverte de ses manuscrits, rassemblés à l'Institut de Dakar sitôt après sa mort. Une légende se construisait autour du souvenir de cet administrateur érudit, si passionné par son sujet qu'il avait fini par se fondre dans la civilisation étudiée. On évoquait toujours avec ferveur, dans les villages du Fouta-Djallon, sa fine utilisation de la langue ; on le sentait adopté et regretté. Quelques-uns des Européens, qui le connurent, disaient avec une certaine réprobation qu'il était « un homme perdu pour l'Occident ».
Georges Balandier. Afrique ambigüe.